Les influenceurs et le Covid-19 : quelles sont les règles à respecter ?

Le marketing digital, le recours à des influenceurs via des réseaux sociaux et la création de contenu en ligne n’ont pas été à l’abri de la pandémie actuelle….

A travers le monde, les gouvernements ont imposé une obligation de “rester chez soi”, autrement dit, des confinements obligatoires ou les sorties limitées. Cela a eu un fort impact sur l’économie, notamment pour ceux qui ont vécu une période de chômage partiel (ou voire des licenciements économiques), ou ceux ont été obligés de suspendre ou même cesser une activité professionnelle. Même si certains ont profité de l’e-commerce pendant le confinement, d’autres ont adapté les consommations “non-obligatoires” afin vivre selon nos moyens ou afin de s’organiser financièrement pendant cet avenir très incertain.

Par conséquent, dans le cadre de notre “new normal”, les influenceurs, et les marques, doivent trouver de nouveaux moyens pour communiquer et inspirer leur public.

Dans cet article, nous considérons comment les influenceurs peuvent continuer à créer du contenu tout en prenant en compte la situation actuelle de la santé publique, et comment ces derniers peuvent s'assurer que leurs contenus seront en conformité avec les règles qu'ils sont tenus de respecter

Quelles sont les règles applicables aux influenceurs ?

Il existe plusieurs lois, règles et lignes directrices de best practice qui ont été élaborées pour les influenceurs. En général, l’ensemble de ces règles s'articulent autour de l'idée que les collaborations entre les influenceurs et les marques, dès lors qu’elle s’agit de la partage de “publicités” doivent être clairement identifiées comme telles, qu'elles soient affichées en France ou ailleurs au sein de l’Union européenne. Les stars des réseaux sociaux doivent notamment penser aux personnes visées par le contenu. En effet, les acteurs des réseaux sociaux ont un certain devoir de vigilance envers ce public lors de la promotion des produits - et ils sont responsables du contenu qu’ils diffusent. Même si le poste d’un contenu sur Instagram dans le cadre d’un partenariat rémunéré pourrait sembler être anodin, l’influenceur diffuse essentiellement un message commercial, qui doit respecter les règles y applicables. 

À cette fin, le Jury de Déontologie Publicitaire (JDP) applique les règles professionnelles définies par l'Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP). Ces règles incluent le guide des influenceurs et du marketing en France publié en 2019, dans lequel l'ARPP a étudié plus de 500 publicités sur plusieurs réseaux sociaux afin d'établir des conseils de meilleures pratiques.

Mais, le champ d'action du JDP se limite à la violation des recommandations de l'ARPP et donc, en outre, les tribunaux français appliquent également les lois nationales sur la publicité, afin de s'assurer que les influenceurs n'induisent pas à tort leur public. Ces lois incluent notamment l'obligation pour la publicité d'être transparente et clairement identifiable, comme prévu par la Loi N° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. De même, le fait de ne pas rendre identifiable la personne responsable d'une publicité constitue une pratique commerciale trompeuse telle que prévue par les dispositions de la Loi N° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie

Cependant, l’état d’urgence sanitaire a créé de nouvelles difficultés pour les influenceurs.

Quel est le problème rencontré aujourd’hui ?

En janvier 2020, alors qu’on a vu les premiers victimes du virus en Chine et que l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) venait de déclarer la pandémie comme une urgence de santé publique mondiale, c’était LE sujet d’actualité. Le sujet a également était vite abordé par influenceurs - à tort ou à raison. On pourrait dire que de rester au courant de ce qui se passe dans le monde, d'écouter ce qui intéresse leur public et d’utiliser les “insights” à un avantage commercial est le coeur de métier des influenceurs.

Certains influenceurs ont utilisé leurs voix pour faire du bien, en affichant des conseils de santé et en encourageant leurs followers à se laver les mains. D'autres ont pris de photos en portant des masques faciaux, encourageant leurs followers à en acheter eux-mêmes. Même l'OMS s'est impliquée avec sa campagne #SafeHands sur TikTok et Instagram, et a également collaboré avec Paul Pogba et avec Genies, une plateforme permettant de créer des avatars, suivie par les rappeurs influents tels que Cardi B et ASAP Rocky. Mais certains d’entre-eux se sont moqués du virus, ont évoqué des conspirations gouvernementales, et ont profité de la peur de leur public pour susciter plus d’engagement à leurs publications.

Aujourd'hui, certains craignent que la pandémie soit utilisée de manière illicite et contraire à l'éthique pour répondre à des besoins commerciaux. Par exemple, le Advertising Standards Agency (ASA) au Royaume-Uni a publié une décision récente dans laquelle une entreprise a envoyé une promotion encourageant ses utilisateurs à acheter son produit vitaminé car il renforce l'immunité, et a souligné qu'un système immunitaire fort combattrait le virus.

Bien qu'elle ne prétende pas que son propre produit combattrait le virus Covid-19 directement, l'ASA a constaté qu'elle communiquait avec les consommateurs, et non avec les professionnels de la santé, et qu'elle avait donc un devoir de vigilance élevé. On ne peut pas s'attendre à ce que ces consommateurs comprennent la signification réelle des revendications médicales et, en ces temps incertains, ils méritent de disposer d'informations claires et précises. 

Alors, comment les influenceurs peuvent-ils s'assurer qu’ils respectent ce devoir de diligence ? 

Les influenceurs et les éthiques

Un sondage mondial mené auprès de 20 000 femmes nous montre que les femmes ne s'engagent pas avec les contenus qui ne leur semblent pas authentiques. Revenir au status quo des photographies à la mode sur les terrasses serait à la fois inefficace, puisque nous savons que ce n'est pas réel, et contraire à l'éthique étant donné ce qui se passe dans le monde.

Les décisions qui ont été rendues pour condamner la publicité des produits proposés pour lutter contre le virus et l'exploitation du hashtag #COVID nous montrent que l'application de la loi ne s'arrête même pas pendant une pandémie. Il y a donc un équilibre à trouver par les influenceurs, en trouvant une nouvelle façon de commercialiser des produits, tout en veillant à ce qu'ils respectent les règles existantes.

Pour contribuer à l'obligation de respecter les règles, le ICAS, l'AEEP et le CONARED, organisations de régulation au niveau mondial, européen et amérique-latine, ont publié une déclaration sur l'importance d'une publicité responsable pendant la pandémie de Covid-19.

En outre, dans un effort pour garantir que les normes de publicité sur le marché des influenceurs restent en vigueur cette période, l'ARPP a introduit une formation officielle sur le marketing des influenceurs et la Chambre de Commerce Internationale propose un webinaire sur le marketing éthique pendant le Covid-19

Les influenceurs doivent réfléchir aux revendications qu’ils font concernant le Covid-19, et ils doivent s'efforcer à rester responsables et de ne pas exploiter les craintes de leurs followers concernant la situation actuelle de la santé publique. Encore plus important, toute revendication faite doit être scientifiquement et médicalement fondée. Influenceurs - si vous n'êtes pas sûr de l'affirmation que vous faites, ne la faites pas. 

De nombreuses entreprises cherchent à tirer profit de la crise actuelle, il est donc important de rester conscient de ce qui pourrait être un fait et de ce qui pourrait être une affirmation sans fondement. Les influenceurs doivent veiller à ne pas répéter les fausses informations qui leur sont fournies par les marques - ils peuvent être considérés comme conjointement responsables des affirmations des marques lorsqu'ils travaillent pour leur compte.

Des conseils pratiques

En temps “normal”, les influenceurs font recours à des équipes de photographes, de stylists et de créateurs de contenu afin de créer un contenu qui semble avoir été fait par l'influenceur lui-même. Aujourd’hui, ces influenceurs sont désormais obligés d'utiliser leur propre maison comme studio et leurs propres compétences pour se faire connaître. Faut-il s'étonner, compte tenu de la pression exercée pour continuer à travailler de la même manière qu’avant, et de la nature étouffante des médias sociaux, que les influenceurs puissent être en violation des règles ou oublier les consignes qu'ils sont censés suivre ?

Pour répondre à cette exigence, il existe un certain nombre d'outils en ligne sur la manière de planifier et de créer du contenu. Certaines plateformes proposent des essais gratuits pour cette formation, compte tenu de la situation actuelle. Certains créateurs se sont également rendus à Instagram pour partager leur savoir-faire avec ceux qui pourraient en avoir besoin, afin de promouvoir un réseau ouvert de formation et d'orientation. Par exemple, il y a eu une augmentation de l'enseignement par webinaire dans l'industrie de la beauté, où les influenceurs partagent des conseils sur la façon de commercialiser, de développer leur marque et de se lancer efficacement dans le marché de l’e-commerce.

Néanmoins, le marketing d'influence est une nouvelle stratégie importante pour de nombreuses entreprises, et peut-être une stratégie qui survivra à cette pandémie, comme on l'a vu avec le lancement de la première édition du Grand Prix Stratégies de l’Influence soutenir par l’ARPP, le Syndicat du Conseil en Relations Publics et l’Union des marques. 

Veuillez partager vos propres conseils avec nous, sur la façon dont nous pouvons travailler ensemble pour suivre les règles, et comme d'habitude, si vous avez des questions juridiques découlant de cet article, n'hésitez pas à nous contacter !

Article rédigé par Lily Morrison et Komal Shemar @ Gerrish Legal, mai 2020 / Photo de couverture : S O C I A L . C U T sur Unsplash

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